Porno About Colt Studios

N’importe quel amateur de porno s’accorde pour s’émerveiller que l’on puisse toujours jouir à un moment précis du DVD, année après année, surtout lorsque c’est associé à l’orgasme d’un acteur qu’on aime bien. Il y a quelque chose de mécanique dans la sexualité masculine que j’adore et je crois même que les bons réalisateurs de porno savent qu’un nombre précis de secondes en plan fixe est nécessaire pour provoquer un orgasme. Personnellement, j’ai beaucoup de films où cette longueur tourne autour de 140 secondes. Pour provoquer une satisfaction garantie, il faut donc 150 secondes environ de plan fixe pour un mec pas peine-à-jouir. 2 minutes, c’est généreux. Davantage is a treat. Raging Stallion le fait très bien, avec des plans séquence au deux tiers d’une scène, quand le réalisateur bloque sur un plan particulièrement hot et laisse filer la caméra pendant 1 minute et demie. Calme. Steady. Nice & slow.

Colt est le maître de ce système, mais la sexualité de Colt, techniquement, est trop dépassée par la sexualité actuelle, celle qu’on voit sur les studios concurrents. Les acteurs font des trucs beaucoup plus sophistiqués ailleurs. Mais cela toujours été l’idée de Colt de faire des films de make believe, dans lesquels les acteurs sont entourés de villas grecques à colonnades (et ne vous moquez pas tout de suite car même si Colt est très kitsch, ils sont incroyables au niveau du décor) ou des haciendas californiennes qui ressemblent à des ranchs de western poussiéreux, avec des mecs poilus qui portent des ceintures en cuir marron avec une boucle en métal qui porte le logo du studio.

Colt fait partie du paysage d’aujourd’hui, comme Tom Of Finland, Pierre & Gilles ou Keith Haring. Ce sont des artistes avec beaucoup de dessins et de mémorabilia. Chez ces artistes, il y a toujours une envie d’être plus grand que nature, avec des hommes réellement choisis selon des critères morphologiques et mythologiques précis. Le dieu grec, le cow-boy, le bûcheron, le clone, vous avez compris, je ne fais pas la liste, en tout cas elle est beaucoup plus longue que la liste des personnages des Village People. Parmi eux, il n’y a pas la fashion queen ou l’emo pas safe.

Bien sûr, il y a dans le lot des bodybuilders qui sont si énormes qu’ils ne parviennent plus à bouger de leur banc de gym. C’est pour ça que Colt les filme au ralenti – ah merde, c’était pas du ralenti, c’était la vitesse normale ? Ces acteurs sont parfois déformés, ils ont souvent des petites bites aussi (comme quoi le cliché tient la route parfois) et ce sont les erreurs de casting logiques chez Colt. C’est comme un prix à payer pour apprécier les autres acteurs. Comme si une écurie d’acteurs porno 100% renversants aurait été trop aveuglante.

Quand on arrive chez Colt, on a l’impression qu’il y a eu un dépassement de budget sur tous les corps de métier. Ce n’est pas une fenêtre, c’est une véranda. Ce n’est pas une piscine, c’est l’océan Pacifique. Ce n‘est pas une botte de foin, c’est la Prairie. Colt n’est pas un studio de prolétaires, c’est le centre du bling bling gay old school, mais d’une manière presque ingénue. Ce n’est pas un studio pervers qui renforce l’idée du consumérisme américain, c’est plutôt un catalogue de tout ce que vous n’aurez jamais dans votre vie, même si vous arnaquez tout le monde autour de vous et que vous faites une vente aux enchères on top of that. Carl Hardwick ? Tu pourrais avoir un mec pareil ? In your dreams. Qui se marie avec des mecs pareils, c’est la question que je me pose toujours. Colt a créé le mythe gay parfait, un acteur comme Rick Wolfmier a vécu sans être sali, c’est un homme gay qui a lancé un comportement, comme Al Parker.

Des fois, je frémis à l’idée que toute cette imagerie gay, celle de Colt, aurait pu disparaître. Je suis sincèrement heureux que des studios aussi uniques soient toujours vivants, et florissants. La photographie de Jim French n’a pas d’équivalent en matière d’art. Je me sens fier d’avoir vu ce studio évoluer au long de ces trente dernières années, et j’étais pratiquement pas là quand Colt est né (enfin, j’avais 2 ans, mais je ne crois pas que j’étais en mesure d’apprécier). C’est le studio porno le plus ancien, avec Falcon. Traverser les années avec Colt, c’est voir l’évolution de l’homme gay, de son corps, de sa manière de se tenir, de faire l’amour. C’est toujours exagéré, mais c’est du porno et du très bon. Avec tous les anciens DVDs de ce studio, il y a de quoi faire une collection perso, comme certains font des collections de films de virus ou de fin du monde. You gotta have Colt.

Je reviendrai plus tard sur les trademarks de ce studio, mais je voulais juste finir par dire à quel point je suis reconnaissant de Colt, c’est tout. Sexuellement, je me reconnais beaucoup plus dans les autres studios porno actuels, mais Colt a eu une influence sur moi que les autres n’ont pas eu. Colt m’a aidé pour grandir, pour admirer, pour choisir certains comportements. Les acteurs m’ont donné des idées sur ce que j’aimais chez les hommes et Colt nous a proposé des milliers d’exemples d’hommes remarquables. Les acteurs se comportaient si bien dans leur sexualité que cela m’a marqué.

Dans les années 2000, quand c’est devenu courant de voir un mec cracher à la gueule d’un partenaire dans un porno, il y a une partie de moi qui a tremblé. À mon époque, faire ça avec un mec au moment de la baise, c’était impossible. Je sais bien qu’il fallait incorporer dans le porno ce que les pratiques SM rendaient de plus en plus courant, mais Colt n’est jamais allé dans cette direction, du moins à ma connaissance. C’est un exemple d’une certaine éthique Colt. On a beau jouer des rôles de flics et de prisonniers, de cow-boys et d’indiens, de masters et de slaves SM cuir, c’est toujours correct face au partenaire. Dans le porno, c’est une politique très difficile à suivre pendant 50 ans. Mais c’est ce qui donne à Colt sa place à part, très paternelle dans la culture gay. Jim French a été un gourou, un mentor qui se retranchait derrière les hommes qu’il mettait en valeur. Sa vie a été nourrie par les plus beaux homosexuels de son temps.

Photos

Rick Wolfmier

Rick Wolfmier

Rick Wolfmier

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